journal posthume

L’atelier

19 mars 2020

J’ai passé toute la matinée dans l’atelier. Il fallait que je découpe des planches. Comme je pense m’installer cet été dans la maison des bois, c’est ainsi que je l’appelle, je prépare les lieux. J’ai besoin d’espace de rangement. La priorité : faire usage de bois, uniquement de bois. Je ne supporte plus les matières chimiquement modifiées, ce plastique à outrance, ni même le métal. Ici, tout doit respirer la proximité naturelle. Il n’est pas exclu de s’y installer définitivement à moyen terme. J’y réfléchis.

journal posthume

Juxtaposition après confinement

Le confinement m’a éloigné de tout. Je me suis demandé : « Et si tout allait prendre fin, comme après la représentation d’un théâtre grandiose ? Et si tout allait s’arrêter ? Peut-être que nous verrions enfin l’envers du décor ? » Mais peut-être aussi que tout a pris fin et que nous rêvons que nous sommes encore là ? Ce sont vraiment des questions que je me suis posées alors que j’étais perdu dans la maison des bois. J’ai vécu avec quelques réserves. Rarement je suis descendu en ville. Mathilde, une bonne amie, prenait de mes nouvelles. Mais je radote. J’ai coupé du bois et fait du pain. J’ai perdu aussi quelques kilos. J’ai contemplé les étoiles.

Le verbe aimer

Vénération

L’instant de la rencontre me hante. Je suffoque presque de ne pouvoir aller vers elle. Il y a dans sa féminité, l’homme que je suis et celui que je vais devenir. Ce moment, cette simple seconde et tout bascule. Dans l’esquisse, je la retiens, je l’enveloppe, je la prolonge. Cet un effleurement inquiet, chargé de vénération. La tentation de ne pas brusquer, le désir de ne pas froisser le dessin. Son aura me hante. Elle est à peine réelle, je la sens naître par ma présence. Elle vit. Je ne veux pas rompre cet instant.