journal posthume

Raideurs

La formidable opportunité est de délier les langues jusqu’à la simplicité évoquée. Évider l’incontournable propos, mais s’ajuster au son le plus harmonieux. De nos innombrables voyages, nous avons rencontré souvent une petite ruelle inévitable, celle que l’on finit toujours par traverser, n’importe où dans le monde, aux relents putrides, qui vous suffoquent jusqu’au plus profond de votre propre âcreté, et vous traversez ce moment d’apnée, courbé à tout jamais, vous perdant dans votre occident, enchaîné par les raideurs pestilentielles et vous ne savez plus si ces odeurs viennent des poubelles d’une cité arriérée d’un quelconque tiers monde, ou bien s’il s’agit de votre mental froidi par des années de conditionnement. Combien de fois avons-nous vomi nos raideurs ? Puis, à plonger dans les yeux d’un enfant en guenilles, nous respirons enfin à plein poumon. Cet enfant misérable, qui me voit tel un dieu, ne sait pas combien sa simplicité vient briser la sclérose de mon cerveau.

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Degré forcené

Le degré forcené de l’écriture épurée est sans doute un ancrage pour l’écrivain. Peut-être plus. Sommes-nous composés de composition ? Sommes-nous asservis par la lecture des mots qui essorent notre réalité et la conditionnent de nos conditionnements ? Des fragments épars de mise en mots dans la délectation à la fois esthétique, consensuelle, épouvantée sans doute par nos parchemins existentiels… Quelle couleur et quelle texture pour amplifier ce qui ne saurait être abordé que par la sincérité ? Jean me parle d’oeuvre, Mathilde de capillarité conjoncturelle (c’est une pure scientifique !). Ni l’un ni l’autre ne me convainc de cette nécessité obligée d’une forme d’aboutissement. Je suis sûr que tout est abouti. Pourtant, nous balbutions sans cesse ce précisément abouti en un recommencement de forme et de synthèse. J’envisage l’écriture comme une mélodie inconnue que je surprendrai à l’orée d’un bois. La mélodie de notre âme ? Ecrire comme le sauvetage de soi, dans l’abandon d’une folie que l’on ménage avec compassion…Sans doute.

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Le désir

Mon désir de la femme est plus que corporel. Quand un homme s’éveille à la femme en lui, il souhaite rencontrer son esprit en elle. Je songe à une vie tranquille, feutrée dans les gestes quotidiens, perdue dans la maison des bois. Je songe à sa présence sereine. La sexualité galvaudée a un goût de cendre. La complicité n’est pas une pulsion, ni même un assouvissement. Nous nous sommes perdus dans la débandade des sens. Nous avons méprisé la femme. Nous nous sommes méprisés aussi.