journal posthume

L’amitié

Édouard a passé quelques jours à la maison. De grandes veillées autour du poêle. Il fait assez doux au cours de la journée. J’aime notre complicité. Elle ne date pas d’hier. Je crois que je ne pourrai pas me passer de mon ami. Dépendance affective ? Bah ! Je n’y crois pas une seule seconde. Une grande complicité nous lie. D’ailleurs, il m’apprend beaucoup. Chaque fois que je le rencontre, je retiens longtemps ses propos. Ils sont des phares dans ma nuit. Ils me permettent aussi d’avancer. Le tunnel est percé de petits trous et la lumière se diffuse. J’apprends à voir. J’apprends à ne plus me mettre au centre. J’écoute. Pour le lion que je suis, c’est très difficile. J’ai cette fâcheuse manie de prendre la place, partout. Alors, me défaire, peu à peu de cette tendance est salvateur. Le monde fonctionne à l’envers. Aujourd’hui, on gratifie celui qui se met en avant. C’est une mutualisation d’encensement sous couvert de plats intérêts. Édouard me dit : Les êtres ne peuvent supporter longtemps de n’être pas le centre d’attention. Tandis qu’eux ne font jamais vraiment d’effort pour durer plus d’un certain temps à établir une profonde relation, occupés qu’ils sont par leur propre personne, ils échafaudent une multitude de stratégies pour qu’on ne regarde qu’eux. Sur le net, si vous ne likez pas quelqu’un, il a tôt fait de ne plus le faire. Pourquoi ? Parce qu’il ne supporte pas que vous ne lui rendez pas la pareille. Donc, vous n’existez pas pour lui. Mais que vas-tu chercher, me lance Édouard ? Tu penses trouver des gens honnêtes, des gens libérés de leur égo ? Dans le fond, je ne cherche rien. Je vois. Cela me fait plutôt rire. Ces relations ne sont que des malentendus, me déclare mon ami. Déchire la toile de ces réseaux et tu verras que peu ont les « couilles » de ce qu’ils prétendent être. Bon, Édouard est ainsi. Il ne mâche pas ses mots. Combien de fois, je suis passé par le tord-boyaux. Mais déglutir de cette façon, c’est aussi abandonner son égo… C’est aussi libérer de l’espace.

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Exacte attitude

La déferlante des acquis depuis tout ce temps, ces discours impossibles, des discours qui sont les coins en bouche, ces coins de bouche qui cumulent une mousse verdissante de moisissures, ou de morsures, taciturnes, pleine d’amertume, qui n’a jamais fait que copier des leçons apprises sur les ricochets d’une société déclinante. Les hommes qui ruminent leur vie manquée par de pseudos pensées écologistes et pacifistes. Tu parles, me dit Édouard, ils font semblant d’être les saints du monde profane. Ils sont insupportables ! Il y a, de nos jours, une prétention à vouloir devenir le saint des temps modernes. « Les biens pensants » qui déclarent être les meilleurs. Ils font la morale, comme on ne l’a jamais faite, et ne manifestent aucune espèce de gratitude à l’égard de quoi que ce soit.. Les vieux grincheux intellectuels. Ont-ils jamais rencontré le réel ? L’exacte attitude c’est de voir que la vie est un grand miracle. On boit le café fumant. Le matin s’éclaire. Ici, la vie chante. J’écoute les paroles d’Edouard. On est des amis depuis si longtemps. Je le regarde. Enfin ! Comme il faut du temps pour regarder ! Comme il faut du temps pour ne pas manquer la vie !