journal posthume

Rêve lucide

Je me suis réveillé brusquement après avoir fait un rêve lucide. Enfin, c’est ce qu’il me semble être. Je ne parviens pas à le qualifier autrement. En ai-je eu des sueurs froides ? Non, pas vraiment. Il s’agit d’une impression très tenace, surréelle qui m’a tenu toute la journée. Ce rêve est survenu sans que je n’eusse pensé à la chose de façon précise. Mais, comment dire ? Je me sens un autre homme depuis mon réveil. La force de la voix, les images, la clarté qui me submergea, comme si mes sens avaient décuplé d’un coup, tout cela me laisse bien perplexe. Une créature qui avait l’apparence d’un homme, mais, et n’allez pas me demander comment je le savais, mais, je savais avec certitude qu’elle n’était pas humaine, me tint par la main et me mena parmi le monde. Son apparence sobre et lumineuse tout à la fois me plongea dans une paix incommensurable. Elle me fit voir toutes les générations des humains, tous les peuples, et ce depuis une multitude de cycles. Je ne saurais rapporter comment je vis toute l’humanité, mais je la vis. Il n’y avait plus de temps, ni de relief. La terre était comme plate et tous les hommes étaient rassemblés. Ils tremblaient de peur. Ils tremblaient de tous leurs membres et pleuraient et gémissaient. La voix me déclara : « Les hommes ont peur de mourir. Ils ont tellement peur de la mort qu’ils tentent avec une hystérie terrible d’exister et de se maintenir en vie. » Chose étrange, c’est qu’il me semblait être épargné par l’épouvante. Je n’éprouvais nullement cette sourde peur. Alors, la créature se tourna vers moi et ajouta : « Tu n’éprouves pas la peur de la mort parce que tu te trouves en ma compagnie ». C’est alors que je fus envahi d’une chaleur et l’amour entra dans mon cœur. « Les hommes ont peur et font tout pour nier la conscience ». Je savais qu’on était venu me chercher et je savais que je rêvais, au milieu du rêve. Pourtant, il ne s’agissait pas véritablement d’un rêve. Mon ami Édouard me dit que l’on appelle cela une vision. Je reste sur cette impression. M’a-t-on soulevé un pan du voile ?

Instantané

L’Adieu d’un frère

Pour elle, j'aurais décroché la lune
Pour elle, j'aurais déplacé des montagnes
Pour elle, j'aurais gravi des dunes
Pour elle, j'aurais connu le bagne.

A l'heure où rosit la fraîcheur des bois,
Tu avais effleuré la douce nuée du lierre
Tenant l'éloge d'un violon aux abois
Plongeant dans les frémissements d'un vert.

Pour elle, j'aurais bu de l'eau claire
Pour elle, j'aurais perdu la vie
Pour elle, j'aurais effacé les rideaux de fer 
Pour elle, j'aurais freiné mes envies.

Dans ses orbites creuses, que la vie déserte,
Une larme. Il pleure, tremble, il a peur.
Ses derniers mots : "j'veux pas crever la gueul'ouverte."
Lucide jusqu'au bout. Adieu en bé mineur.